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[Critique] Synchronic: horreur cosmique lo-fi

Note des lecteurs4 Notes
3.5
Note Horreur Québec

Justin Benson et Aaron Moorhead sont deux des voix les plus originales à être apparues dans la nébuleuse du cinéma de genre lors de la dernière décennie. Raconteurs incroyables, les cinéastes n’ont jamais laissé de modestes budgets se mettre dans le chemin de leurs ambitions (leur premier long-métrage, Resolution, avait été produit avec 20 000$). Leur cinéma évoque Philip K. Dick et H.P. Lovecraft. Il parvient à développer des idées denses et ambitieuses autour d’ingénieux concepts de mise en scène ainsi que de personnages charismatiques qu’on a envie de suivre à travers ces mindfucks science-fictionnels. Synchronic pourrait bien être le film qui attirera davantage d’attention sur l’oeuvre atypique de Benson et Moorhead, puisqu’ils y tournent pour la première fois avec des stars hollywoodiennes.

Steven (Anthony Mackie) et Dennis (Jamie Dornan) sont amis depuis toujours et travaillent ensemble comme ambulanciers à la Nouvelle-Orléans. Steven est un éternel célibataire au passé tourmenté, enviant la vie de famille de Dennis, qui lui se plaint de s’y sentir prisonnier. Lorsqu’une drogue mystérieuse appelée Synchronic se met à faire des ravages à travers la communauté, nos protagonistes sont en première ligne sur des scènes de crime de plus en plus étranges. Et quand la fille de Dennis disparait mystérieusement après avoir consommé une dose de Synchronic au même moment où Steven apprend qu’il souffre d’un cancer incurable, les choses s’emballent pour notre duo. Est-ce que Synchronic peut réellement envoyer dans le passé les personnes qui la consomment?

Synchronic affiche filmOn se garde d’en dire trop sur le concept, qui verse encore une fois dans l’angoisse cosmique et évoque Slaughterhouse-Five de l’auteur Kurt Vonnegut dans son rapport particulier au temps. Synchronic remet en question la nature du temps, ainsi que de l’Histoire, ce qui l’amène à adopter une perspective unique sur ses personnages. Benson et Moorhead font leur magie coutumière, superposant ce concept métaphysique fou à l’histoire d’une amitié abimée entre deux hommes.

La chimie qui unit nos protagonistes, leur lien profond et l’amour qu’ils se portent, est évidente. Malgré tout, on fait leur connaissance à un moment de dérive émotionnelle. Mackie (Captain America) et Dornan (50 Shades of Grey) incarnent ces hommes en crise, dont Synchronic approfondira la vulnérabilité, qui sont un peu devenus les protagonistes typiques du cinéma de Benson et Moorhead.

Les comédiens vendent bien leurs personnages, notamment Dornan dont le Dennis semble constamment prêt à mordre. Steven (Mackie) est de son côté beaucoup plus sympathique et abordable. C’est d’ailleurs à lui qu’on offre la majorité du temps d’écran dans la deuxième moitié du film. Alors qu’il accumule les découvertes sur Synchronic, on le suit avec grand intérêt dans ses aventures rocambolesques tantôt loufoques, tantôt angoissantes.

Difficile à classifier, l’intrigue évolue à travers ses ruptures de ton et une économie narrative impressionnante. L’ambiance de Synchronic, à la fois psychédélique et mortifère, est accentuée par les décors atypiques de la Nouvelle-Orléans dont Aaron Moorhead (qui agit aussi comme directeur photo) exploite la ruine. Le quotidien d’ambulanciers des personnages, qui déambulent dans ces décors nocturnes surréalistes comme Nicolas Cage l’a fait autrefois dans Bringing Out the Dead, contribue à créer un étrange sentiment de torpeur.

Synchronic manque peut-être un peu de temps pour faire mûrir toutes ses idées, surtout une tangente qui rappelle Antebellum dans sa façon de mettre en relation passé et présent pour un personnage racisé aux États-Unis. La conclusion de cet arc laisse perplexe. Synchronic s’impose tout de même comme un film intriguant, touchant et maîtrisé venant de cinéastes qui ont déjà fait beaucoup pour affirmer leur style unique. Si les noms Justin Benson et Aaron Moorhead ne vous disent toujours rien, vous êtes franchement dûs pour une rétrospective de leurs quatre longs-métrages!

SYNCHRONIC (2020) Official Trailer | Anthony Mackie, Jamie Dornan

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