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[Critique] « Nervures » : ou l’art de parler pour ne rien dire

Présenté dans le cadre du festival Cinémania, le nouveau long-métrage de Raymond St-Jean, Nervures, sera projeté le 13 novembre prochain au Cinéma du Musée. Horreur Québec a eu la chance de le découvrir en primeur, une œuvre ambitieuse qui, malgré de belles intentions, laisse un sentiment partagé.

Quand Isabelle apprend que son père Maurice est malade, elle quitte Montréal pour rejoindre Saint-Étienne, un ancien village forestier isolé et frappé par le déclin économique. À son arrivée, le choc est brutal : sa mère Thérèse lui révèle que Maurice est en réalité décédé. Les circonstances troublantes de sa mort, combinées au comportement instable de Thérèse, éveillent chez Isabelle un profond malaise. Alors que des incidents étranges se multiplient dans le village, la jeune femme découvre un mystère plus sinistre et terrifiant qu’elle n’aurait jamais pu imaginer. 

Un film sans âme

À mes yeux, Nervures est un long-métrage manquant d’âme. Le scénario emprunte plusieurs clichés éculés et, malgré une intention évidente, Nervures peine à trouver sa véritable ambiance. Le résultat semble constamment en décalage, sans rythme ni réelle cohésion.

Je me dois tout de même de souligner que, bien que l’exécution manque de finesse et qu’il nous échappe ce petit je-ne-sais-quoi qui permettrait d’adhérer pleinement au récit, l’idée de départ demeure intéressante. Peut-être pas la plus originale, certes, mais porteuse d’un potentiel qui aurait mérité un développement plus nuancé.

L’effort porté à la dimension sonore est perceptible : on sent une volonté d’immersion et une recherche d’atmosphère. Cela aurait pu sauver le film, sincèrement. Malheureusement, le résultat s’avère souvent agressif et surchargé, rendant l’expérience plus irritante qu’envoûtante.

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Parler pour ne rien dire

Avec Nervures, on retrouve certaines des lacunes déjà présentes dans le précédent long-métrage de Raymond St-Jean, Crépuscule pour un tueur. À commencer par la faiblesse des dialogues : non seulement ils sont maladroitement interprétés, mais ils sont aussi étonnamment mal écrits. Très rapidement, on comprend que le problème de Nervures se répercute à toutes les étapes du processus — de la scénarisation à la postproduction. Ici, les dialogues semblent avoir été écrits pour être lus, et non pour être vécus.

St-Jean aurait tout intérêt à laisser respirer davantage les silences, à permettre à l’image et à la mise en scène de parler d’elles-mêmes, plutôt que d’alourdir le film par un flot de paroles qui finit par le rendre indigeste. Nervures est un film verbeux… qui, paradoxalement, ne dit pas grand-chose. On s’attarde sur des futilités, et lorsque des indices importants apparaissent, on comprend qu’ils le sont grâce au langage cinématographique et aux codes visuels employés, mais sans toujours parvenir à saisir leur sens. Le tout finit par paraître confus, voire brouillon.

Direction artistique et photographie intéressantes

La direction artistique mérite d’être soulignée : maquillages, accessoires et décors sont soignés. La direction photo, sans être spectaculaire, est bien travaillée. L’éclairage des scènes intérieures, par exemple, est particulièrement réussi — c’est d’ailleurs dans ces moments qu’une légère atmosphère parvient à émerger de ce chaos narratif. On y perçoit une douceur, une simplicité et une mélancolie amère qui s’installent subtilement. Dommage que cette attention aux détails ne soit pas constante tout au long du film.

Nervures SC128 ©Danny Taillon 21642

Tentative ratée d’inclusion

Un certain malaise subsiste face à une tentative d’inclusion qui peine à trouver son sens. La présence d’un couple lesbien, dont l’une des partenaires est racisée, semble surtout servir de prétexte à la critique homophobe de certains personnages plus âgés, sans véritable retombée narrative. Une telle représentation, si elle ne s’intègre pas organiquement au récit, risque de paraître forcée plutôt que signifiante. Pour qu’une démarche d’inclusion prenne tout son sens, elle doit s’accompagner d’une intention claire et d’une portée symbolique qui dépasse la simple présence à l’écran.

En bref

Malgré plusieurs aspects positifs, Nervures révèle certaines fragilités dans la direction d’acteurs et dans la cohérence de ton. On perçoit une œuvre en transition, traversée par une recherche sincère mais encore indécise — de soi, de l’art, du public. Cette quête d’équilibre, parfois vacillante, confère toutefois au film une dimension profondément humaine et personnelle, marquée par une volonté d’exploration plutôt que de certitude.

NERVURES de Raymond St-Jean - CINEMANIA 2025
Nervures
Note des lecteurs0 Note
Pour les fans...
De Crépuscule pour un tueur
De québécois
Du festival Cinémania
2
Note Horreur Québec

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