« (…) Quand ils m’ont ouvert le ventre pour te sortir de là, c’est comme s’ils m’avaient vidée. Je n’avais plus rien à l’intérieur, je ne sentais plus rien, pas de colère, pas de joie, rien. C’est pour ça que la première fois que je t’ai vu, je ne t’ai pas reconnu. Tu étais un étranger. Je n’ai pas compris tout de suite que tu étais l’amour de ma vie. (…) » — Peau à peau, Chloé Cinq-Mars
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Dans le domaine de l’horreur, la maternité est un sujet trop souvent exploité depuis la perspective masculine. Je pense par exemple à Rosemary’s Baby de Roman Polanski ou bien même Mother de Darren Aronofsky : d’excellents longs métrages, oui, mais qui passent outre plusieurs éléments bruts de l’expérience féminine. Encore plus rares sont les films qui traitent de la dépression post-partum, un sujet qui, avouons-le, reste extrêmement tabou, même encore aujourd’hui. Peau à peau de Chloé Cinq-Mars, avec qui nous avons eu la chance d’échanger quelques mots à l’occasion de Fantasia 2025 (consulter l’entrevue juste ici), se démarque tant au niveau de son traitement de la dépression post-partum que de celui du deuil.
Pénélope (Rose-Marie Perreault), une danseuse professionnelle nouvellement mère, souffre sans aucun doute de dépression post-partum. Elle voit son quotidien encore plus bouleversé après avoir assisté à un vol à main armée dans un dépanneur, un événement perturbateur qui fera remonter à la surface des maux du passé. Entre son manque de sommeil, un bébé exigeant, un géniteur peu proactif et une vieille flamme qui se repointe le bout du nez, la jeune femme peinera à distinguer la réalité de ses délusions.
![[Fantasia 2025] « Peau à peau » : Sous la peau, il y a les trippes 15 PAP Stills 00142442](https://cdn.horreur.quebec/wp-content/uploads/2025/07/PAP_Stills_00142442.jpg)
Dissociation du corps et de l’esprit
L’image de Peau à peau est englobante : on y favorise des plans rapprochés qui mettent l’emphase sur les textures, les gouttes de sueur, le sang, les plis, la bave — bref, tout ce qui est de plus humain. Le spectateur s’immisce donc à l’intérieur de l’expérience de Pénélope plutôt que de n’être qu’un regard extérieur empreint de jugement. Cette perspective est primordiale, mettant la femme au cœur du narratif, une notion qui reflète l’intention de la réalisatrice, qui n’était pas d’aliéner sa protagoniste mais de refléter son expérience dans toute sa complexité et son authenticité.
On ressent immédiatement que la corporalité est centrale dans Peau à peau, le sens du toucher étant une partie fondamentale de la maternité. Cinq-Mars ne recule pas devant la pudeur en montrant le corps de la mère sous toutes ses facettes les plus sanguinolentes. C’est ce corps que l’on voit tranquillement se dissocier de l’esprit au fil du film, alors que la charge mentale, le manque de sommeil et les traumatismes accumulés viendront saturer la jeune femme jusqu’à la rupture.
![[Fantasia 2025] « Peau à peau » : Sous la peau, il y a les trippes 17 PAP Stills 00201648](https://cdn.horreur.quebec/wp-content/uploads/2025/07/PAP_Stills_00201648.jpg)
Réveiller d’innombrables blessures
Le visuel, généralement assez sombre avec des jeux d’ombres et de lumière, représente bien l’état d’esprit dans lequel plonge la mère. Très vite, on s’aperçoit qu’il y a anguille sous roche, car derrière l’épuisement postnatal extrême se cache autre chose : le deuil.
Le récit devient fragmentaire, décousu — comme sa notion du temps et de la réalité. Une adolescente du nom de Charlotte viendra hanter son quotidien sous forme de flashbacks et d’apparitions ambiguës : on comprendra éventuellement qu’il s’agit de sa sœur décédée il y a plusieurs années.
![[Fantasia 2025] « Peau à peau » : Sous la peau, il y a les trippes 19 PAP Stills 00093585](https://cdn.horreur.quebec/wp-content/uploads/2025/07/PAP_Stills_00093585-750x375.jpg)
Danser avec l’angoisse
Peau à peau s’inscrit en tant que thriller psychologique en faisant valser l’auditoire avec la peur : autant en vivant les mêmes délusions et hallucinations que sa protagoniste, qu’en ressentant la menace constante de l’infanticide. On se crispe à l’idée d’un être vulnérable à risque d’un incident — la tension grandissante est donc centrée sur cet élément. Cependant, la faute n’est pas mise sur la mère, mais plutôt sur le manque de ressources accessibles pour alléger sa lourde tâche.
Le long métrage comporte toutefois quelques longueurs et clichés au niveau de la construction des personnages, notamment la méchante belle-mère et l’amoureux fainéant qui n’apporte littéralement aucun soutien. Cela dit, la performance de Rose-Marie Perreault en vaut amplement la chandelle. Elle nous dirige avec expertise et sensibilité à travers ce véritable périple psychologique rempli de suspense. Rendez-vous en salle dès l’hiver prochain.
Le trailer est maintenant disponible sur MUBI.

![[Fantasia 2025] « Peau à peau » : Sous la peau, il y a les trippes 12 Peau a peau](https://cdn.horreur.quebec/wp-content/uploads/2025/06/Peau-a-peau-1155x770.jpg)


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