Bien qu’il n’ait pas la notoriété de Stephen King, Clive Barker est parvenu lui aussi à marquer de manière indélébile le monde de l’horreur (sans compter qu’il est un meilleur réalisateur que le célèbre auteur du Maine). Dès son premier film, Hellraiser, Clive Barker a proposé un univers totalement décalé avec ses créatures aux allures BDSM qui font encore des petits aujourd’hui. Après une déclaration d’amour aux freaks et autres marginaux avec Nightbreed, le cinéaste britannique arrive en 1995 là où on ne l’attend pas, avec un film noir horrifique intitulé Lord of Illusions (Le Maître des illusions).
À l’approche du 25 août, date du 30e anniversaire de la sortie du film, revenons sur ce dernier long métrage de l’auteur britannique derrière la caméra.
Après une enquête éprouvante liée à l’exorcisme d’un jeune garçon, le détective new-yorkais Harry D’Amour (Scott Bakula) est envoyé à Los Angeles pour une simple affaire de fraude à l’assurance. Ce qui devait être une enquête plutôt banale prend une tournure inquiétante lorsque le détective se retrouve bien malgré lui mêlé à une histoire de meurtre liée à une secte dissoute plus de treize ans plus tôt, après la mort de son gourou Nix (Daniel von Bargen), surnommé « Le Puritain ».
À en croire les propos de Clive Barker, sa volonté de croiser le cinéma d’horreur et le film de détectives aurait donné des maux de tête au studio MGM/UA, qui a produit Lord of Illusions. Au point où une douzaine de minutes ont été retranchées du film lors de sa sortie en salle afin de mettre moins d’emphase sur l’aspect « noir » du récit. Si la version du réalisateur est heureusement disponible en vidéo, ce choix de MGM/UA a-t-il nui au succès commercial du film, comme le prétend Clive Barker? Difficile à dire, mais une chose est sûre : le film aurait mérité de meilleures critiques.
Il est vrai qu’à l’image du nom de famille du détective, certains aspects du film peuvent sembler plutôt kitsch. C’est le cas, notamment, de l’idylle amoureuse entre Harry D’Amour et Dorothea Swann (Famke Janssen), qui reste légitimement critiquable. Mais ce côté kitsch s’avère totalement justifié pour le monde factice dans lequel prend place le récit : celui des spectacles d’illusionnistes et des célébrités hollywoodiennes.
L’horreur, la véritable, se retrouve surtout dans l’introduction et dans la conclusion du film, le récit misant surtout sur l’enquête de D’Amour et sur des scènes de dialogues, ce qui peut créer un sentiment de longueur pour certains spectateurs. Cela n’empêche pas Clive Barker de parsemer son film de plusieurs morceaux de bravoure, comme la scène où Philip Swann (Kevin J. O’Connor) est transpercé par plusieurs épées devant un public horrifié lors d’un numéro de magie qui tourne mal.
Et que dire de l’excellente musique de Simon Boswell (Dust Devil) qui succède avec brio à Christopher Young et Danny Elfman avec qui Clive Barker avait travaillé précédemment?
Tiré de la nouvelle The Last Illusion, Lord of Illusions aurait pu être le premier chapitre des aventures d’Harry D’Amour au grand écran, un détective privé spécialiste de l’occulte, que l’on retrouve dans plusieurs autres écrits de Clive Barker (ainsi que dans des BD) et qui évoluerait apparemment dans la même réalité que les Cénobites de Hellraiser.
Ce ne fut malheureusement pas le cas, du moins pour l’instant. On peut toujours espérer que cette profonde injustice soit un jour corrigée…
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