C’est assez difficile de ne pas tomber en amour avec le collectif de La Famille Adams (à ne pas confondre avec les célèbres gothiques américains éponymes), ce groupe de cinéastes réalisant leurs films à la sueur de leur front, dans leur cour arrière, avec une caméra vidéo assez bancale, mais une énergie et un amour pour leurs projets très perceptibles. Après avoir été à la tête de plusieurs productions d’horreur trash telles que Hellbender ou Where the Devil Roams, la famille récidive cette année avec Mother of Flies, qui est probablement à ce jour leur œuvre la plus personnelle et sensible, malgré qu’on y retrouve encore la folie et l’énergie qui les définissent.
Mother of Flies raconte donc l'histoire d'une jeune femme (Zelda Adams) qui, après avoir essayé sans succès d'affronter son cancer à l'aide des traitements de chimiothérapie habituels, a recours à l'accompagnement d'une femme mystérieuse (Toby Poser), vivant au creux de la forêt, qu'elle a rencontrée dans l'un de ses rêves. Elle se rend donc chez la guérisseuse, accompagnée par un père réticent (et qui le restera jusqu'à la fin du récit, les personnages ne connaissant pas une très forte évolution dans le film). Et dès lors, on assistera au processus spirituel proposé par la femme qui se révélera bien vite pratiquer la sorcellerie, à l'aide de rituels de plus en plus graphiques impliquant toutes sortes de créatures de la forêt.
Le trio de cinéastes, qui vit, comme leurs personnages, dans une maison reculée dans le bois, transpose ce mode de vie et leur spiritualité en forte connexion avec la nature afin de livrer un récit de sorcellerie puissant. La force principale du film est définitivement la représentation de ce qu’incarnent la sorcière et ses rites, à l’écoute de la beauté de la nature, jusqu’à la mort et la décomposition faisant partie intégrante de la vie. C’est là que réside tout l’intérêt de la proposition, et où on assistera à ses scènes les plus remarquables.
En contrepartie, la mise en scène des moments plus dialogués est assez laborieuse. Les plans et le montage sont parfois rudes, ainsi que les répliques, souvent improvisées, qui gagneraient à être resserrées et retravaillées. Le premier tiers du film, qui introduit les personnages et où on n’accorde pas encore d’importance au paganisme et à la spiritualité qui viendra par la suite, est particulièrement rude. Mais une fois qu’on fait abstraction des maladresses techniques (imposées par un équipement somme toute rudimentaire et un jeu parfois vacillant), on peut mieux apprécier la finesse et l’intelligence des séquences plus horrifiques, où on présente une imagerie des rites païens et de la connexion spirituelle avec la nature assez originale, parfois dérangeante.
Dans toute la filmographie de la Famille Adams, Mother of Flies est sans doute leur proposition la plus personnelle. Plusieurs membres du groupe ayant eux-mêmes affronté un cancer, on sent une volonté d’exprimer la douleur face à la maladie, mais également la rage de la vaincre, et ce, peu importe les moyens. Avec une famille qui semble aussi soudée et unique que les Adams, on n’a aucune difficulté à croire à la force spirituelle qui les anime, et on a envie de célébrer avec eux, au travers du cinéma unique qu’ils nous offrent. C’est au travers de leurs imperfections et leurs erreurs de parcours que la famille nous fait part de son unicité et de sa vulnérabilité, et c’est avec des propositions comme celles-là, à des lieues des productions à grand budget qu’on nous sert habituellement, que le cinéma de genre profite de sa richesse et de sa créativité.
