Frankenstein en 2025 : pourquoi Guillermo del Toro réveille encore le monstre de Mary Shelley
Le roman de Mary Shelley a plus de deux siècles, et pourtant il ne cesse de hanter nos écrans. Après James Whale en 1931, Kenneth Branagh en 1994 ou encore d’innombrables déclinaisons plus ou moins fidèles, c’est Guillermo del Toro qui s’empare aujourd’hui du mythe. Son Frankenstein, en salle le 17 octobre puis le 7 novembre 2025 sur Netflix, n’est pas seulement une nouvelle adaptation : il s’inscrit dans un moment culturel où la figure de la créature rejetée et de son créateur orgueilleux trouve une résonance particulière.
Frankenstein, miroir de nos peurs contemporaines
Quand Mary Shelley écrivait son roman en 1818, elle interrogeait déjà les limites de la science et le vertige d’un savoir qui dépasse son maître. Deux cents ans plus tard, les débats autour de l’intelligence artificielle, du clonage ou de la manipulation génétique ravivent ces mêmes questions :
qu’arrive-t-il quand l’homme joue à Dieu?
En ce sens, le film de del Toro arrive à point nommé. Son récit n’est pas seulement gothique, il est aussi éminemment actuel.
Une obsession personnelle qui rejoint l’universel
Del Toro a toujours parlé des monstres comme de figures profondément humaines. De l’amphibien amoureux de The Shape of Water à l’enfance brisée de Pan’s Labyrinth, ses créatures traduisent solitude, différence et désir d’appartenance. Avec Frankenstein, le cinéaste met en scène le monstre des monstres, celui qui concentre tous les autres. C’est autant un projet intime qu’une réponse à notre époque : dans un monde où les identités marginalisées cherchent reconnaissance, la Créature de Shelley devient une métaphore brûlante.
Dans l’héritage des grandes adaptations
Chaque génération a modelé Frankenstein selon ses obsessions : le cinéma expressionniste dans les années 1930, l’horreur romantique dans les années 1990, et aujourd’hui la fresque gothique baroque de del Toro. Là où Branagh insistait sur la passion dévorante et le spectaculaire, del Toro annonce un drame plus intimiste, centré sur les liens brisés entre père et fils, créateur et création. Le teaser présenté à Tudum 2025 — entre visions baroques et décors décrépits — suggère un film qui prolonge les thématiques et l’esthétique déjà développées dans Crimson Peak et Pinocchio.
Pourquoi ce Frankenstein comptera
Si le roman de Shelley fut longtemps lu comme un avertissement sur les dérives de la science, del Toro préfère y voir un miroir de nos obsessions les plus intimes : le désir de créer, le besoin d’aimer, la peur d’être abandonné. Dans ses propres mots, Frankenstein n’est pas un simple récit d’horreur mais « un drame sombre et somptueux », où chaque plan tente de conjuguer la puissance visuelle du conte gothique et la douleur d’une tragédie familiale.
Au-delà de l’attente des cinéphiles, ce Frankenstein a le potentiel d’être lu comme une somme, un film-synthèse. Pour del Toro, il s’agit d’une obsession artistique enfin mise en images. Pour le public, il pourrait devenir la version définitive d’un mythe qui nous accompagne depuis deux siècles.
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