Dans le prolongement de notre article Baisers de sang : quand les vampires réveillent le désir au cinéma, publié il y a quelques semaines, si Jean Rollin a su, à sa manière, filmer un désir empreint de trouble et de mélancolie, il n’est pas le seul à avoir exploré cette zone floue où le vampire révèle l’intime, le caché, et ce que la société s’efforce de refouler.
De l’Europe gothique aux États-Unis post-Vietnam, en passant par la Corée contemporaine, certains films poursuivent cette veine érotique, mélancolique et sensorielle du mythe vampirique.
Voici cinq films, choisis en toute subjectivité, qui prolongent l’élan amorcé lors de notre top de la Saint-Valentin. À redécouvrir ou à savourer pour la première fois, ces œuvres explorent le désir comme une pulsion obscure, où le corps devient un territoire traversé de tensions, la morsure devient une promesse, et le plaisir une force qui échappe à toute domestication.
1. The Hunger (Les Prédateurs) – Tony Scott (1983)

🎬 Pourquoi le voir?
Parce que c’est l’un des derniers éclats du gothique érotique des années 70, sublimé par l’esthétique glacée des années 80. Catherine Deneuve et David Bowie forment un couple de vampires aussi élégants que maudits, hantant un New York décadent. Entre sensualité trouble, triangle amoureux et pulsions immortelles, The Hunger offre une vision stylisée, queer et vénéneuse du mythe — portée par Bauhaus et une scène saphique devenue culte.
2. Fascination – Jean Rollin (1979)


🎬 Pourquoi le voir?
Parce qu’il s’agit sans doute de l’un de ses films les plus aboutis, où l’étrangeté épouse le désir dans un ballet hypnotique de lenteur et de silence. Tourné dans un château isolé, Fascination installe un théâtre de femmes, magnétique et cruel, où la morsure devient rituel et le sang, caresse. Rollin y distille son goût du gothique sensuel, entre tableaux vivants et poésie macabre. Un film à la beauté vénéneuse, qui préfère la suggestion à l’explication — et laisse derrière lui le parfum entêtant d’un rêve interdit.
3. Let’s Scare Jessica to Death – John D. Hancock (1971)


🎬 Pourquoi le voir ?
Parce que c’est un bijou oublié du cinéma d’horreur psychologique, un film qui glisse lentement sous la peau. Hancock y capte l’effritement de la raison avec une grâce morbide, entre hallucinations, silence rural et menace sourde. Loin du gore, Let’s Scare Jessica to Death installe un malaise diffus, presque aquatique, où la folie et le surnaturel se confondent. Une œuvre fragile et hantée, à la croisée de Bergman et du mythe vampirique, qui laisse planer un doute jusqu’au dernier souffle.
4. Ganja & Hess – Bill Gunn (1973)


🎬 Pourquoi le voir ?
Parce que c’est une œuvre rare, libre et envoûtante, où le vampirisme devient métaphore de la dépendance, du trauma racial et du désir sacrilège. Bill Gunn y déconstruit les codes du genre avec une sensualité fiévreuse et une beauté presque liturgique. Un film maudit devenu culte, restauré avec soin, et ravivé par Spike Lee — pour qu’on n’oublie pas que l’horreur peut aussi être politique, mystique et profondément intime.


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5. Thirst – Park Chan-wook (2009)


🎬 Pourquoi le voir ?
Parce que Park transforme le mythe du vampire en tragédie sensuelle, cruelle et baroque. Un prêtre devenu buveur de sang vacille entre foi et pulsion, entre culpabilité et jouissance. Porté par une mise en scène d’une précision virtuose, Thirst mêle érotisme charnel, humour noir et vertige moral — pour un film aussi beau que dérangeant..
![La morsure du désir : 5 films à la frontière du plaisir et de l’horreur 27 Thirst (2009) BLU-RAY TRAILER [HD 1080p]](https://www.horreur.quebec/wp-content/plugins/wp-youtube-lyte/lyteCache.php?origThumbUrl=https%3A%2F%2Fi.ytimg.com%2Fvi%2FjjtHj4XR_Is%2F0.jpg)
![La morsure du désir : 5 films à la frontière du plaisir et de l’horreur 28 Thirst (2009) BLU-RAY TRAILER [HD 1080p]](https://www.horreur.quebec/wp-content/plugins/wp-youtube-lyte/lyteCache.php?origThumbUrl=https%3A%2F%2Fi.ytimg.com%2Fvi%2FjjtHj4XR_Is%2F0.jpg)
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Au-delà des crocs et des capes, ces cinq films rappellent que le vampire, bien plus qu’une créature fantastique, ne cesse de se réinventer comme miroir critique de nos désirs, de nos peurs et de nos normes collectives. Qu’il murmure dans un château français, s’égare dans l’Amérique rurale ou séduit sous les néons de Séoul, il incarne toujours une faille.
Regarder ces films aujourd’hui, c’est aussi mesurer comment l’horreur, loin de fuir le réel, en explore les zones d’ombre avec une acuité parfois plus juste que bien des discours.




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