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[Critique] « The Substance » : miroir, miroir, dis-moi qui est la plus horrifiante

Après une projection aux retours dithyrambiques au Festival de Cannes, où il a remporté le prix du meilleur scénario, The Substance a créé un véritable engouement grâce à son énigmatique première bande-annonce et son récit tout aussi mystérieux, dont les tenants et aboutissants sont gardés encore plus secrets qu’un film de la Marvel Cinematic Universe. Alors, est-ce que le film vaut le déplacement?

Ancienne superstar hollywoodienne, Elisabeth Sparkle (Demi Moore) vieillit et sa carrière en prend un coup. Elle n’attire plus les foules, et son étoile commence lentement à s’éteindre. Pire encore, quand l’émission de fitness qu’elle anime — la seule chose la maintenant encore un peu dans l’œil du public — est annulée, son désespoir grandit. Mais une solution miracle s'offre à elle : un produit pharmaceutique nommé La Substance. En l’utilisant, elle renaît sous les traits de Sue (Margaret Qualley), une femme plus jeune, plus belle, plus charismatique, qui redonnera un nouveau souffle à sa carrière, tant qu’elle respecte certaines règles...
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Pour répondre à notre propre question d’il y a deux paragraphes : oui, oui et re-oui! Ce nouveau film de Coralie Fargeat (Revenge) est une véritable claque sur la gueule qui vous fera quitter la salle jubilatoire et/ou traumatisé·e·s, en vous demandant : « mais qu’est-ce que je viens de vivre? »

Vous venez de vivre un film de body horror particulièrement intense, où chaque scène semble redéfinir le genre en vous laissant à la fois fasciné·e et horrifié·e. L’appellation body horror n’a d’ailleurs que rarement été aussi vraie qu’ici. Les transformations physiques que vont vivre nos protagonistes tout au long du récit sont immensément dérangeantes et deviennent de plus en plus grotesques et insoutenables en cours de route.

On a vraiment l’impression d’assister à un grave accident où une voiture serait entrée en collision avec une moissonneuse-batteuse en marche. Il s’agit d’une bouillie de chair et d’os horrifiante devant laquelle on ne peut détourner le regard, malgré tout ce que nos instincts nous dictent. Cela est d’autant plus vrai lors du point culminant du film, l’une des séquences les plus folles et déchaînées qu’on ait vues au cinéma depuis des années. Le tout est cimenté par d’incroyables effets pratiques signés Pierre Olivier Persin et Olivier Afonso, qui avaient également œuvré sur Grave et Titane de Julia Ducournau. On ressent également l’influence massive de David Cronenberg sur le film de Fargeat; le géant du cinéma ne pourra qu’être fier de ce que son œuvre a inspiré.

Cela dit, The Substance a bien plus à offrir que du gore grand-guignolesque, car il est également réellement intelligent dans son écriture et ses thématiques. Le film aborde et critique de manière acerbe l’industrie hollywoodienne et, surtout, les standards de beauté et de jeunesse irréalistes qu’elle impose aux femmes qui la peuplent, d’où le choix brillant d’engager Demi Moore dans le rôle principal. L’actrice de 61 ans a été critiquée récemment pour son recours à la chirurgie esthétique et la choisir pour interpréter une femme prête à tout pour rester jeune est donc une idée qui parle d’elle-même dans ce contexte. Moore est d’ailleurs véritablement excellente dans ce rôle. On voit bien qu’elle se donne à fond, et il est difficile de ne pas être fasciné·e par son jeu. Ayant roulé sa bosse à Hollywood pendant plus de 40 ans, on sent que le sujet et son personnage lui tiennent à cœur. L’actrice démontre énormément de vulnérabilité, tant physique qu’émotionnelle; il s’agit sans doute de la performance la plus sincère de l’année.

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The Substance utilise et critique d’ailleurs énormément le male gaze à travers le personnage de Dennis Quaid (The Parent Trap), un producteur véreux et pervers qu’on pourrait décrire, en citant le critique de cinéma Karim Debbache, comme « un des personnages les plus répugnants de l’histoire de la crasse ».

Ainsi, le métrage fait usage de nombreuses scènes sexualisant abondamment ses personnages féminins, mais ce n’est jamais gratuit, bien que parfois ces séquences s’attardent un peu trop longtemps sans réelle justification. C’est d’ailleurs le seul reproche que l’on peut faire à The Substance : son deuxième acte est légèrement trop long et rempli de plans qui s’éternisent sur les fesses et les seins des personnages. Si l’intention était justement de créer un malaise en refusant de passer à autre chose, elle nuit un peu au rythme global du film, en plus d’être assez grossière malgré les bonnes intentions de la réalisatrice.

Fargeat pousse aussi son concept tellement loin qu’il en devient parfois hilarant tellement ça devient gros, mais c’est loin d’être une mauvaise chose et le tout s’inscrit parfaitement dans le style et sa démarche. Certains rires de malaise sont donc à prévoir.

The Substance est une de ces œuvres qui vous marqueront au fer rouge, autant par sa violence que par ses thématiques pertinentes, son imagerie mémorable et ses performances de haut calibre. Il ne s’agit pas seulement de l’un des meilleurs films d’horreur de l’année, mais bien d’un des meilleurs films de l’année tout court. Alors, courez dans une salle de cinéma et injectez-vous ce film directement dans les veines!

Note des lecteurs2 Notes
Pour les fans...
de body horror grand-guignolesque
de films qui refusent toute forme de compromis
4.5
Note Horreur Québec

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