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[Critique] « The King Tide » : entre horreur folklorique et tensions communautaires

Dans le genre de l’horreur folklorique, nous avons récemment eu droit à plusieurs représentants intéressants : des histoires de sorcellerie de la Nouvelle-Angleterre avec The Witch de Robert Eggers aux sectes rituelles suédoises qui aident à surmonter une rupture de Midsommar d’Ari Aster, en passant par les difficultés parentales de la campagne islandaise dans Lamb de Valdimar Jóhannsson. Avec The King Tide (La Grande marrée), Christian Sparkes nous offre un film d’horreur folklorique canadien directement venu de Terre-Neuve!

Une communauté insulaire de la côte Est canadienne en difficulté reçoit une mystérieuse bouée de sauvetage sous la forme d'un nourrisson échoué sur sa plage. Le bébé rayonne d'une aura rajeunissante, guérissant quiconque passe quelques instants en sa présence. Mais après une décennie de prospérité, les parents adoptifs d'Isla doivent décider si sa sécurité est plus importante que les attentes de leur communauté.
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Tout d’abord, The King Tide n’est pas un film d’horreur, ou du moins pas au sens classique du terme. Bien qu’il comporte plusieurs éléments horrifiques dans son scénario, ceux-ci sont traités de manière plus subtile et moins appuyée. Pas de jump scares à outrance, ni de créatures surgissant de l’ombre pour déchirer violemment les entrailles d’un pauvre figurant ignorant. Nous sommes davantage dans l’ordre du thriller psychologique que du véritable film d’épouvante, mais ce n’est absolument pas une mauvaise chose.

L’équipe du film est bien plus intéressée à poser une ambiance oppressante qu’à créer des sensations fortes bon marché. Cette atmosphère constitue la plus grande force du film, prenant le public à la gorge et serrant de plus en plus au fil de la progression, jusqu’à ce qu’on ne puisse plus respirer. Tout cela est renforcé par une direction photo particulièrement soignée, de longs plans de caméra qui laissent respirer le film ainsi qu’une musique envoûtante qui parvient presqu’à nous hypnotiser. La combinaison de tous ces éléments crée un film duquel se dégage un sentiment de malaise constant, donnant l’impression que chaque porte de chaque petite maison pourrait cacher des actes monstrueux, trop horribles pour même être mentionnés.

Thématiquement, The King Tide est assez riche, abordant entre autres le fondamentalisme religieux de façon étonnamment nuancée. Alors que d’autres films abordent le sujet uniquement de façon négative, l’œuvre de Christian Sparkes le retourne dans tous les sens pour en montrer les bons et mauvais côtés. On nous parle notamment d’un tissu communautaire serré qui donne de l’importance et un sentiment d’appartenance à chacun de ses membres, mais aussi de l’isolement que cela entraîne.

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Le film se déroule sur une petite île au milieu de nulle part, où les habitants entretiennent une haine profonde (qui ne sera jamais justifiée ou expliquée) envers ceux qui habitent sur le continent. À un tel point qu’on interdit aux habitants de quitter l’île et qu’on laisse croire à la petite que le monde extérieur est simplement inexistant. C’est là que le film pose la question : quand la protection devient-elle dangereuse? Chaque règle est censée avoir pour objectif de protéger Isla du monde extérieur. Le film soulève ici l’hypocrisie des villageois lorsqu’on se souvient que la fillette vient elle-même de ce monde extérieur et finalement, la protéger n’est qu’une excuse pour garder les membres de la communauté aussi dociles et manipulables que possible. Comme bien des organisations religieuses, la protection des enfants n’est qu’un prétexte pour propager de la haine et des idées tout aussi fausses que dangereuses.

The King Tide est un film à combustion lente qui prend vraiment son temps pour installer son univers et ses enjeux. Autant ça permet à la tension du récit de bien s’installer, autant on sent vraiment les 100 minutes s’écouler, surtout lors du deuxième acte plus lent et pénible à surmonter. C’est encore pire avec les habitants du village, personnages particulièrement fades. On les confond souvent, on oublie leur nom et ils n’ont pas de véritables personnalités. Le film les traite comme une unité à la place de les développer individuellement et ce n’est pas suffisant pour nous donner envie de les suivre.

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Aussi, malgré sa montée de tension incroyablement maîtrisée, The King Tide mène à une finale assez molle, qui laisse le public sur sa faim. Cela donne un véritable effet de pétard mouillé et nous fait quitter le film avec un sentiment de vide, où on se dit : « C’est tout? ». Cette fin au ventre mou risque de frustrer plusieurs personnes, surtout celles pour qui la lenteur du film était particulièrement exigeante.

Au final, The King Tide est un film d’horreur folklorique très intéressant pour ses thématiques et son atmosphère, mais qui divisera beaucoup les foules en raison de ses personnages inintéressants, de sa lenteur et de son climax décevant. Si vous êtes fans de films comme The Witch ou It Comes at Night, vous y trouverez sûrement votre compte.

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Note des lecteurs2 Notes
Pour les fans...
de cinéma d'ambiance et plus intellectuel
de films qui prennent leur temps
3.5
Note Horreur Québec
Horreur Québec